La poursuite des choses évidentes

 

23.09.2018 – 11.11.2018

 

Antoine Jacqz

Clara van der Belen

Nicolas Bourthoumieux

Jonas Meier

Julien Dumond

Salomé Boltoukhine

Douglas Eynon

Tom Rider & Delphine Wibaux

Gijs Milius

Claude Cattelain

Nancy Moreno

Régis Jocteur Monrozier

 

 

Cette exposition consacre un ensemble de gestes dédiés ou offerts à l’édifice.

 

Grisée par le temps d’une industrie sénile, la grande tour Atlas se tient dans la ville comme sanctuaire du doute urbain.

Du dehors déjà, l’intérieur de la bâtisse est une intrigue préoccupante. Le temps y semble arrêté.

Que se passe-t-il dans le silence des bâtiments gris ?

L’exposition pénètre cette surdité comme le courant d’air du monde présent traversant au ralentit le corps nu et passé du titan Atlas. Les espaces se donnent les dimensions d’un voyage aux proportions muséales alors que la chaire des murs impose à l’air et aux oeuvres une inévitable décrépitude.

 

Des artistes se sont réunis là, au nom de la poursuite des choses évidentes, dans et pour le lieu. Ils sont venu y apposer leurs oeuvres, avec la rigueur précieuse, le respect nécessaire et la fatale poésie qui s’en échappe. Le visiteur se surprend à chaque instant voyeur de la conversation entre le vide du bâtiment et les traces et interventions laissées par les artistes. C’est dans ce dialogue flagrant que se trouve le centre des préoccupations artistiques.

 

Certaines pièces sont rapportées au dedans, à savoir qu’elles sont des souffles du dehors invoquées ici par les artistes. Dans une installation vidéo, Jonas Meier libère des frissons de genèse sur trois grands écrans flottants parmi les piliers de la tour. Le chant du monde emplit la tour et remonte ses vertèbres de vibrations et d’émotions primaires. Le fréquenteur est livré dans ces lieux ou les forces élémentaires parlent sans les Hommes.

Salomé Boltoukhine et Julien Dumond ont eux généré un microcosme, qui possède ses propres lois et dimensions dans l’espace. Une sculpture d’acier tourne suspendue telle deux astres scintillants, et c’est de cette lente rotation qu’est décidée la temporalité. Tendant elle même à se débrancher, fatalement, la sculpture coupera au même instant l’installation électrique, faisant disparaître les sons, les images et la lumière qui existent autour d’elle. Alors les esprits s’échappent et la pièce retombe à son ère de nudité post-industrielle.

Nancy Moreno, dans la chapelle qui frôle le sommet de la tour, a déposé l’une de ses peintures à l’huile, peinte tout spécialement pour cette exposition. De taille modeste, le tableau se révèle dans le sombre des murs avec la préciosité d’un petit corps céleste qui implose en son coeur de teintes gorgées par l’exotisme des nuées stellaires. La chapelle à été entièrement repeinte au bleu de nuit pour accueillir le tableau. Il est également accompagné de deux dessins.

 

D’autres artistes se sont appliqués à travailler sur le bâtiment même. Dans le silence noir des sous sols, Clara Van der Belen à reproduit la tour principal dans une réduction sculpturale et fidèle, en béton. Les vingt-huit colonnes de chaque plateau supportent le plateau supérieur, jusqu’au sommet. La lumière jaillit du dedans en division colorée sur la terre battue. Les couleurs datent, chaque fragment de verre constituant les fenêtres provient des carreaux cassés de l’authentique tour. De son mètre de haut, la sculpture impose le mutisme habituel des cryptes et des tombeaux.

Nicolas Bourthoumieux à travaillé sur la lumière. Celle d’abord, artificielle, d’un vaste espace sans fenêtres. L’installation se découvre elle aussi dans le silence naturel venu d’une autorité humble et solennelle. Les rangées de tubes néons lévitent à quinze centimètres du sol. Le geste de descente à été opéré méticuleusement par l’artiste, depuis l’emplacement originel de chaque support lumineux. La dimension de la pièce s’en retrouve retournée. La perspective nouvelle charge l’atmosphère d’une intelligence insondable et semble ralentir l’écoulement du temps. Au dernier étage de la tour, Nicolas Bourthoumieux matérialise dans une autre pièce, la vitesse de la lumière solaire, entre l’astre et notre Terre. Sa sculpture d’acier a valeur d’outil, et ne peux faire exister sa matérialisation qu’autour de la période du solstice d’été. Le soleil s’aligne alors dans la facette ouest du bâtiment, et la sculpture mesure.

Claude Catellain est venu se dépenser pour un songe de monumentalité. Son oeuvre kiss me baby se tient droite et miraculeusement élevée malgré la demie tonne de plâtre qui la constitue. Elle ne tient qu’à la force mécanique — ou musculaire ? — des quatre sert-joints qui font s’éterniser ce baiser architectural.

Antoine Jacqz à lui travaillé sur le potentiel d’un contact entre le ciel et la terre, au travers de la tour Atlas. C’est avec un spécialiste de la foudre qu’il a étayé son idée d’installer un paratonnerre de dix-sept mètres sur le toit de la tour. Un fil de ter en cuivre traverse chaque plateau de béton armé sans jamais les toucher, depuis la base de la lance dressée au ciel jusqu’à la terre, plus bas encore que les sous sol. La ligne est tendue, le cuivre se baigne dans ses reflets. Dès lors, la possibilité existe.

 

 

L’exposition, ouverte depuis le mois de septembre 2018, représente une avancée essentielle pour l’espace culturel de la brasserie Atlas. Pour la première fois en deux années, le collectif a investit la bâtisse principal du complexe qui depuis des décennies et jusqu’alors ne subissait que la présence des oiseaux citadins.

En Silence, ils se sont donné à la tâche monumentale du nettoyage en s’attardant sur nombre de détails qui relèvent l’abandon du lieu au rang de noble vestige. Un total de près de dix mille mètres carrés se sont trouvés aptes à la création. Les membres du collectif ont travaillés pour ce en quoi il croient durant cinq mois avant l’ouverture de l’exposition, sans subventions ni soutient financier quels qu’ils soient.

Six artistes de En Silence ont présenté et installé des oeuvres aux lieux, et six autres ont été invités de l’extérieur. Chacun à pu jouir du luxe d’investir des espaces personnels distincts, et s’est donné l’ambition de créer des oeuvres inédites spécifiquement consacrées à cette exposition. L’autorité naturelle de la tour à joué le rôle d’un curateur, ménageant ses murs pour une scénographie aérée, inattendue, rigoureuse et radicale.

 

Au travers des étages de l’authentique tour Atlas, ce sont donc des artistes expérimentés à l’international et des jeunes dont le travail commence à résonner qui se sont retrouvés dans un brassage vertigineux d’actes, de gestes et de questionnements à la poursuite des choses évidentes.

 

Clara van der Belen

Nicolas Bourthoumieux

Jonas Meier

Antoine Jacqz

Salomé Boltoukhine et Julien Dumond

Douglas Eynon

Gijs Milius

Claude Cattelain

Salomé Boltoukhine

Antoine Jacqz

Nicolas Bourthoumieux

Nancy Moreno

Régis Jocteur Monrozier

Antoine Jacqz